A- La Chine et le modèle soviétique (1949-1956)
En 1949, à l’issue d'une guerre civile de 22 ans et quatre ans seulement après une guerre de
huit ans contre le Japon, la Chine doit
surmonter les défis d'une reconstruction politique et économique.
- L'arrimage de la Chine dans le bloc socialiste
Afin de reconstruire le pays, Mao Zedong (surnommé "le Grand Timonier"), fait le choix de rejoindre le camp soviétique et de s’allier à l’URSS. En 1950 est signé un traité d’amitié, d’alliance et d’assistance entre la Chine et l’URSS [doc 1 p.231] et la Chine adopte le modèle soviétique.
- L'arrimage de la Chine dans le bloc socialiste
Afin de reconstruire le pays, Mao Zedong (surnommé "le Grand Timonier"), fait le choix de rejoindre le camp soviétique et de s’allier à l’URSS. En 1950 est signé un traité d’amitié, d’alliance et d’assistance entre la Chine et l’URSS [doc 1 p.231] et la Chine adopte le modèle soviétique.
Affiche de propagande chinoise |
Solidaire de l'URSS dans le cadre
de la GF, la Chine communiste s'engage
contre le bloc capitaliste. Le pays envoie en 1950 plusieurs centaines de
milliers de "volontaires chinois" soutenir la Corée du Nord [dossier p.232] lors de la Guerre de Corée (1950-53). La Chine
soutient également le vietminh pendant la guerre d'Indochine en fournissant une
aide logistique aux communistes vietnamiens et participe aux négociations de
paix à Genève en 1954 où le ministre chinois des affaires étrangères Zhou Enlai joue un rôle décisif.
- La Chine se pose en leader du Tiers-Monde émergent
Ce dernier représente également Pékin à la conférence de Bandung en 1955 appuyant ainsi l'émergence du Tiers-Monde et la décolonisation.
- Le nationalisme Chinois et le projet de "Grande Chine"
- La Chine se pose en leader du Tiers-Monde émergent
Ce dernier représente également Pékin à la conférence de Bandung en 1955 appuyant ainsi l'émergence du Tiers-Monde et la décolonisation.
- Le nationalisme Chinois et le projet de "Grande Chine"
Dans le même temps, la Chine
cherche à restaurer sa puissance régionale en Asie du Sud et de l’Est et à
recouvrer son territoire: le Tibet indépendant depuis 1912 est
envahi en 1950; La Chine reprend
quelques îles côtières à Taïwan où se sont réfugiés les nationalistes chinois
du Guomindang (parti nationaliste
chinois au pouvoir en Chine de 1928 à
1949)
B. La rupture avec l'URSS et la reconnaissance internationale de la
Chine (1956-1978)
La fin des années 1950 et le
début des années 1960 marquent une rupture avec l’allié soviétique.
Doc.2 p.231 : en 1956, les
dirigeants chinois accueillent mal les nouvelles qui leur viennent du XXème
congrès du Parti Communiste de l’Union Soviétique (PCUS) qui prônent la
déstalinisation et la coexistence pacifique
avec les Etats-Unis. Or, ces critiques du régime soviétique risquent de
retomber sur Mao, proche de Staline, à une époque où le culte du " Grand Timonier" ne cesse
de s’amplifier. Ensuite, Mao Zedong commence à remettre en question la pertinence du
modèle soviétique fondé sur l'industrialisation alors que la Chine est un pays
majoritairement agraire et que les masses chinoises sont paysannes. Enfin, Mao
estime que le développement de la Chine doit s’appuyer sur une voie propre et
unique, indépendamment de toute influence extérieure, autrement dit une voie
adaptée aux réalités chinoises, un communisme
sinisé.
La rupture sino-soviétique se traduit par l’abrogation des traités, le
renvoi des experts soviétiques envoyés en Chine par l’URSS, des tensions entre
les deux pays (incidents aux frontières en 1969, critique ouverte par la Chine
de l’attitude de l’URSS pendant la crise de Cuba).Par ailleurs, la Chine affirme son indépendance en faisant exploser sa première bombe atomique en 1964.
Dès lors, Mao inscrit la Chine
dans une voie particulière. Au niveau international et diplomatique, la Chine
cherche à trouver sa place et à s’affirmer dans le monde. Tout d’abord la Chine
cherche à s’imposer comme tête de file des pays non alignés, le Tiers-Monde. Dans
les années 1960, la Chine met en avant son soutien indéfectible aux mouvements
indépendantistes et apparaît pour les nouveaux Etats africains comme un modèle
de développement socialiste alternatif. De plus, elle arme les guérillas communistes
indépendantistes, comme en Angola, au Mozambique ou en Namibie.
Concernant les relations avec les
pays occidentaux, en particulier les Etats-Unis, les relations sont marquées
des deux côtés par un certain pragmatisme. Alors que la
période des années 1950 était caractérisée par une forte opposition entre la
Chine et les Etats-Unis, les années 1960 et 1970 sont au contraire marquées par
un rapprochement diplomatique. Les Etats-Unis veulent affaiblir l’URSS en
se rapprochant de son concurrent au sein du bloc socialiste mais aussi acteur indispensable dans la résolution de la guerre du Vietnam. La Chine ne cherche plus à rejeter
absolument les Etats-Unis. Ainsi en 1971,
l’équipe de ping-pong américaine accepte une invitation en Chine (c’est la « diplomatie du ping pong »). La même année, la Chine entre à l’ONU
(en remplacement de Taïwan) suite à la levée du véto des Etats-Unis. En 1972,
Nixon effectue le premier voyage officiel d’un président américain en Chine
communiste (doc 4 p.231).
C. Le modèle chinois dans le monde entre attraction et rejet
A l’intérieur, Mao lance des
grandes réformes pour développer le pays. Les deux plus importantes sont « le Grand bond en avant » (1958-1961) et la
« Révolution culturelle »
(1966-1969). Le petit livre rouge
(recueil de citations, de discours et d’écrits de Mao) devient le symbole de
la Révolution culturelle. En effet, sa
lecture devient obligatoire à l’école, sur le lieu de travail, à l’armée, etc.
Les conséquences de la Révolution culturelle furent catastrophiques à moyen et long terme
mais les idéaux de cette révolution, véhiculés notamment par le petit livre
rouge, ont trouvé un écho dans le monde occidental.
Mao, icône révolutionnaire pour les étudiants de Mai 68 (ici à la Sorbonne) |
La Chinoise de Jean-Luc Godard (1967), exemple de fascination occidentale pour le maoïsme
Pourtant les dérives du régime
commençaient à être connues à travers le monde par des rumeurs, à défaut d’une
information fiable et indépendante sur la situation intérieure chinoise. Le «
Grand bond en avant » de 1958-1961 qui devait mobiliser les masses chinoises
afin d’accroître la production agricole mais surtout industrielle débouche sur
une famine catastrophique qui a tué environ 20 à 30 millions de paysans. La «
Révolution culturelle » (1966-1969) devait créer la « voie chinoise » pour
l’édification du socialisme chinois a en réalité généré un climat de violence
contre toutes les élites (intellectuelle, économique, politique). Les « ennemis
du peuple » sont chassés, torturés, tués, humiliés, envoyés dans les laogai (camps de travail sur le modèle
du Goulag soviétique) notamment par les gardes rouges (jeunes maoïstes chargés
de débusquer les traîtres et les suspects). Ces moments de l’histoire de la
Chine communiste ont fini par ternir son image à l’étranger et ont bloqué la
modernisation du pays (grave baisse de production, effondrement des recettes de
l’Etat, société déstabilisée) qui s’est privée à la fois de ses élites et de sa
jeunesse. Ainsi, les politiques radicales de transformation voulues par Mao au
service de la puissance chinoise n’ont en réalité qu’affaiblit le modèle
économique chinois et ont retardé la normalisation de ses relations avec le
reste du monde.
Mao décède en septembre 1976 et
sa s'en suit une crise de succession : Deng
Xiaoping, ancien secrétaire général du Parti communiste chinois écarté
pendant la Révolution culturelle sort vainqueur de ces oppositions en devenant
dirigeant de la RPC en décembre 1978 et entame une nouvelle ère pour l’histoire
de la Chine.
II. La renaissance du dragon (1979-2015)
A- La modernisation et ses limites (1979-1989)
Conscient du retard cumulé par la
Chine pendant la période maoïste tant dans le domaine économique que sur la
scène internationale, Deng Xiaoping lance alors des réformes (les "4 modernisations") dont l’objectif
est d’intégrer davantage son pays dans la mondialisation naissante.
La modernisation économique passe notamment
par la création en 1980 des quatre Zones
Economiques Spéciales (ZES, déf. p.236 carte p.237). Il s’agit de créer sur
le littoral sud à proximité des petites Chines capitalistes véritables défis à
la Chine communiste des zones franches proposant aux entreprises étrangères des
conditions préférentielles pour s’installer, permettant ainsi un afflux de
capitaux étrangers (IDE) : Zhu Hai à côté de Macao, Shenzhen face à HK,
Xiamen et Shantou face à Taïwan.
Devant le succès des quatre
premières ZES, l’Etat crée quatorze « villes côtières ouvertes » en 1984 puis
des « zones littorales ouvertes ». Ces réformes permettent à la Chine de
s’insérer dans la mondialisation.
Par ailleurs, la Chine intègre le
FMI et la Banque mondiale en 1980, multiplie les accords commerciaux avec des
pays occidentaux et signe un accord avec le Royaume-Uni afin de récupérer Hong-Kong (1984 pour 1997) et avec le
Portugal pour Macao ( 1987 pour 1999).
Une des célèbres photos du XXe siècle par Stuart Franklin symbole du pacifisme et de la démocratie contre le militarisme et le totalitarisme |
Cependant, au milieu des années
1980, les réformes atteignent leurs limites : creusement des inégalités entre
le littoral et l’intérieur du pays, absence de liberté d’expression,
redistribution inégale des revenus de l’Etat, augmentation de la corruption,
etc. Le contexte international (URSS en déclin, mise en place de perestroïka et
glasnost par Gorbatchev, dissidences en Europe de l'Est) alimente également les
velléités de liberté de certains Chinois, en particulier les étudiants. Au printemps 1989, des mouvements de
protestation démocratiques naissent un peu partout dans les grandes villes. Fin
avril, des milliers d’étudiants de l’université de Pékin occupent la place Tian’anmen. Certains ouvriers se
joignent au mouvement. Fin mai, le gouvernement déclare la loi martiale et
envoie l’armée à Pékin pour rétablir l’ordre. Du 4 au 8 juin 1989, les chars
pénètrent dans la ville et tirent à balles réelles sur les manifestants faisant
autour de 2000 morts. L’opinion étrangère assiste au drame et s’indigne de
l’attitude d’un pays qui semblait être entré dans une nouvelle ère depuis la
mort de Mao. L’image de la Chine est brusquement ternie, la RPC est de nouveau
mise à l’écart de la scène diplomatique. Toutefois, malgré quelques sanctions
internationales prises contre le régime, la Chine poursuit son intégration
économique à la mondialisation : les firmes transnationales sont de plus en
plus attirées par les faibles salaires pratiqués en Chine et les législations
du travail très favorables aux entreprises.
B. La Chine devient la 2e
puissance économique mondiale
La crise de 1989 souligne le
paradoxe du communisme chinois et les limites de la modernisation : libéral sur
le plan économique et autoritaire sur le plan politique. En 1992 le PCC invente
un nouveau concept : "l'économie
socialiste de marché". Ce concept vise à combiner une économie
socialiste planifiée et une économie de marché. La libéralisation économique
s’accentue : les réformes appliquées aux ZES sont accordées à toutes les
régions qui le demandent, les prix sont totalement libérés, un système bancaire
moderne est mis en place, les privatisations d’Etat se multiplient. En 1991, la
Chine intègre l'APEC (coopération économique de l'Asie-Pacifique) puis l’OMC
en 2001 et le G20 en 2008 et la décennie
correspond aux années de croissance record du pays : plus de 10% par an ce qui
permet au pays de devenir la 2e puissance économique mondiale devant le Japon
en 2010.
L'économie chinoise se diversifie
et monte en gamme en développant ses capacités technologiques et scientifiques
: premier producteur de vêtements ou de jouets, la Chine est aussi devenue le
premier producteurs de trains à grande vitesse, de voitures ou de panneaux
solaires.
Forte de sa croissance économique
et de son excédent commercial, la Chine peut développer ses ambitions
géopolitiques car elle appuie désormais son développement et sa croissance sur
les relations économiques avec le reste du monde. Le grand projet chinois actuellement sous la présidence de Xi Jin Ping est par exemple de créer une "nouvelle route de la soie" afin de faciliter le transport de marchandises par voie terrestre et maritime entre la Chine et l'Europe.
La Chine s'intéresse également toujours au
continent africain à la fois
réserve de matières premières et marché de consommation en devenir délaissé par
les pays occidentaux. On parle ainsi de la Chinafrique
pour qualifier ces liens de plus en plus forts entre la puissance asiatique et
le continent africain( doc. p5 p.243). Le pays renforce enfin ses liens de
coopération avec les autres émergents dans le cadre des rencontres du BRIC depuis 2009 (BRICS avec l'intégration de l'Afrique du Sud en 2011).
C. Les velléités de forger une puissance globale
La stratégie de puissance de la
Chine est complète :
- elle renforce notamment son
hard power par le biais d'un développement de son appareil militaire. En 2003,
la Chine envoie même le premier taïkonaute
dans l'espace. La Chine dispose du 2e budget militaire au monde et a annoncé
fin décembre 2015 la construction d'un deuxième porte-avion. Il s'agit pour
elle de renforcer le contrôle des routes maritimes indispensables à son
approvisionnement en matières premières (notamment le pétrole importé du
Moyen-Orient qui représente 40% de la consommation chinoise de pétrole) mais
aussi à ses exportations. La Chine peut notamment s'appuyer sur des bases
navales ou des facilités portuaires dans des pays alliés autour de l'océan indien (stratégie dite du "collier de perles'"). Cette
stratégie de puissance se heurte parfois aux intérêts des autres pays de la
région notamment le Japon ou l'Inde qui constituent les principaux rivaux de la
Chine au sein de l'espace asiatique. Pour autant, le doc. p.236 nous montre que
la Chine reste très loin derrière les EU sur le plan militaire et ceux-ci continuent
de protéger le Japon, Taïwan ou la Corée du Sud contre les ambitions chinoises.
Le "collier de perles" chinois |
- la Chine ne néglige pas non
plus le soft power : la Chine diffuse sa culture par le biais de son cinéma
(Wong Kar Wai, Zhang Yimou et ses stars Zhang Ziyi, Gong Li, Jet Li) , de sa
langue (510 instituts Confucius dans 140 pays en 2016), l'accueil de grands
événements internationaux comme les JO de Pékin en 2008 ou l'exposition
universelle de Shanghai en 2010. La Chine peut s'appuyer notamment sur sa
diaspora très importante : environ 35 millions de Chinois vivent hors de Chine
notamment en Asie du Sud-est et en Amérique du Nord.
Toutefois, l’intégration chinoise
reste limitée politiquement, du fait de nombreuses critiques portées au modèle
chinois. La cause tibétaine, la censure imposée par le régime et l’arrestation
des opposants (par exemple le prix Nobel de la paix en 2010 Liu Xiaobo toujours
en prison) attirent sur la Chine les critiques récurrentes de l’opinion
publique internationale. Le modèle économique n’est pas exempt de critiques :
le développement rapide chinois s’accompagne d’une émission massive de gaz à
effet de serre, les villes géantes consomment espace et ressources sans souci
de durabilité. La Chine prend cependant conscience des limites environnementales
de son modèle de développement et a contribué à la réussite de la COP 21 à
Paris contrairement à la conférence de Copenhague ce qui tend à souligner que
la Chine assume désormais ses responsabilités de grande puissance industrielle.
Conclusion : La Chine est devenue un pays incontournable dans les
relations internationales et dans le processus de mondialisation. Sa puissance
s’est reconstruite par étapes, suivant un processus assez original. S’appuyant
tout d’abord sur le modèle soviétique puis sur une « voie chinoise »: un
développement singulier fondé sur les idées communistes. Sous l’impulsion de
Mao dans un premier temps qui, malgré les nombreux excès de sa politique, va
installer la Chine dans le concert des nations. Puis des dirigeants qui lui ont
succédé en acceptant une ouverture au monde (ouverture économique, mode de vie,
etc.) et en adoptant le « socialisme de marché ». Son rayonnement s’est élargi
non seulement spatialement (de l’échelle régionale à l’échelle internationale)
mais aussi en terme de domaines d’influence (d’abord plutôt politique et
idéologique puis diplomatique et économique). L’ascension rapide et complète de
la Chine effraye une partie du monde occidental expliquant notamment la mise en place de mesures protectionnistes aux EU pour lutter contre l'immense déficit commercial vis-à-vis de la Chine.
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